Stop au sexisme dans la publicité !
Question d’actualité à Mme Isabelle Simonis, ministre de l’Enseignement de promotion sociale, de la Jeunesse, des Droits des femmes et de l’Égalité des chances
Madame la Ministre, chers collègues, cette affiche qui mettait en scène une petite fille en tablier rose est accompagnée du slogan: «Osez réaliser vos rêves… Devenez auxiliaire de ménage!».
Le problème n’est pas d’oser ses rêves ni de vouloir devenir auxiliaire ménagère. Le problème est qu’il s’agit comme par hasard d’une petite fille et comme par hasard du métier d’aide-ménagère. Cela renforce évidemment les stéréotypes de genre, c’est sexiste. Quant au jury d’éthique publicitaire qui a été chargé d’examiner un certain nombre de plaintes qui ont été déposées, il a qualité cette campagne de désuète.
Le FOREM s’est tout de suite excusé et a retiré cette affiche malheureuse. C’est d’autant plus dommage que cette institution est sensible à la question du genre. Elle a par exemple formé ses conseillers en orientation professionnelle aux questions du genre. Elle a déjà lancé des campagnes mettant en exergue des femmes qui exercent des métiers principalement destinés aux hommes, comme les métiers de la construction.
De toute cette histoire, on peut tirer un certain nombre de constats. Étonnamment un constat positif d’abord. La population a réagi très vite et très fort. J’y vois un signe positif, celui d’un changement de mentalité. Il y a 20 ans, je ne suis pas sûre que ce genre de publicité aurait fait réagir les gens. C’est donc malgré tout un élément positif.
Par contre, vous en conviendrez, il y a aussi des constats négatifs. Cela reflète, de manière globale et en prenant un peu de recul par rapport aux événements, la part de sexisme qui subsiste dans le domaine de la publicité, des études, de l’orientation professionnelle et du travail.
Je sais, Madame la Ministre, que vous y êtes attentive. Vous avez notamment créé l’assemblée participative Alter Égales qui a émis toute une série de recommandations sur la formation des enseignants ainsi que sur le renforcement de l’opération Girls’ day, Boys’ day qui vous tient tant à cœur et dont vous parlez souvent.
Il y a aussi la nécessité de former les communicants. Ce qui a fait réagir la majorité de la population n’a visiblement suscité aucune réaction de la part des communicants internes.
Mes questions sont donc: comment peut-on redoubler d’efforts et quelles mesures peut-on prendre pour éviter que ce genre de situation ne se reproduise à l’avenir? J’appelle de mes vœux l’organisation d’un débat au niveau wallon concernant l’opérateur en question. Si je m’adresse à vous, Madame la Ministre, c’est surtout sous l’angle du sexisme dans la publicité et en général. Quelles mesures peut-on prendre pour combattre les stéréotypes sexistes ?
Réponse
Merci, chers collègues, à mon tour, de vous souhaiter une belle année 2017, même si l’année a effectivement bien mal commencé du point de vue du sexisme et des stéréotypes hommes-femmes. Nous nous trouvons en présence d’une publicité sexiste. Je me réjouis que la directrice du FOREM ait réagi très vite, non seulement en s’excusant, mais aussi en retirant cette publicité.
Cela étant, il ne s’agit malheureusement pas d’un cas isolé. L’on voit qu’une série de publicités, voire de campagnes de communication publique, comportent encore pas mal de stéréotypes ou véhiculent une vision inégalitaire de la société.
Que faire par rapport à cela? Comme on l’a évoqué avec Mme Leal-Lopez, nous devons continuer à développer en Communauté française des campagnes de sensibilisation, d’information et de conscientisation. Une deuxième piste à laquelle je travaille est la réalisation d’une grille d’analyse des publicités sexistes. En concertation avec JeanClaude Marcourt, nous pourrions intégrer cette grille dans le baromètre «Diversité et égalité dans les médias audiovisuels».
Comme vous l’avez évoqué, l’assemblée pour les droits des femmes Alter Égales a planché sur cette question durant un an et je souhaiterais pointer deux de leurs recommandations.
Elles plaident d’une part pour le renforcement de la formation en prévoyant des modules de sensibilisation au genre pour toute une série de professions, notamment les journalistes de même que les acteurs du monde du marketing et de la communication.
D’autre part, elles recommandent d’intégrer dans le cahier des charges de la Communauté française une clause de genre. Il s’agit d’une sorte de filtre permettant de mieux prendre en compte la question du genre dans nos futures campagnes de communication. Des discussions à ce sujet sont en cours avec le Ministre-Président et le ministre du Budget. Les autres niveaux de pouvoir sont d’ailleurs libres de s’en inspirer.
Je voudrais terminer sur une note positive pour laquelle je partage votre avis, Mme Morreale: nous avons effectivement pu constater la belle mobilisation de la société civile vis-à-vis de cette publicité controversée, qu’il s’agisse des citoyens et des citoyennes, mais aussi des journalistes, des personnalités de la presse. Aujourd’hui, on ne peut donc plus faire n’importe quoi, ce qui indique que les mentalités ont particulièrement bien évolué.
Christie Morreale – Madame la Ministre, je vous remercie pour vos réponses et pour les propositions que vous avancez, tant celles qui sont issues des associations de femmes comme Alter Égales que celles que vous avez faites et que je trouve intéressantes concernant la clause à insérer dans les marchés publics. Ne serait-il pas aussi envisageable de consulter automatiquement le Jury d’éthique publicitaire (JEP) – dont les avis ne sont pas obligatoires – lorsqu’il s’agit d’opérateurs publics? Il ne me paraît pas inintéressant de disposer de l’avis du JEP lorsqu’un opérateur public est concerné.
Vous avez également souligné l’importance de la formation au genre dans les secteurs de la communication et du marketing. Je pense aussi au travail de M. Marcourt sur la formation de base des enseignants, car ils ont un rôle éducatif important à jouer et préparent les jeunes à choisir une orientation professionnelle dans le cadre de l’enseignement maternel, primaire et secondaire; cette formation de base devra donc aussi comprendre des mesures en termes de genre et d’égalité hommes-femmes, et je suis certaine que vous y êtes attentive.