Recyclage et réutilisation : donner une seconde vie aux déchets électroniques
Région wallonne
QUESTION ORALE DE MME MORREALE À M. DI ANTONIO, MINISTRE DE L’ENVIRONNEMENT, DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE, DE LA MOBILITÉ ET DES TRANSPORTS, DES AÉROPORTS ET DU BIEN-ÊTRE ANIMAL, SUR « LES DÉCHETS D’ÉQUIPEMENTS ÉLECTRIQUES ET ÉLECTRONIQUES »
Monsieur le Ministre, j’ai un peu étoffé ma question depuis le moment où je vous ai déposé le projet pour vous parler du taux de réutilisation des DEEE et des objectifs wallons.
La gestion des équipements électriques et électroniques est une problématique prise à bras-le- corps par la Région wallonne depuis plusieurs années, puisque le Plan wallon des déchets Horizon 2010 adopté par le Gouvernement, en 1998, prévoyait notamment des mesures spécifiques pour améliorer la gestion des déchets.
De ce plan a découlé la création de l’ASBL Recupel, il y a 14 ans, dont la mission est d’organiser la collecte, le tri, le traitement et le recyclage des appareils électriques et électroniques usagés.
Le système a commencé à fonctionner en 2001. L’obligation de reprise de certains déchets en vue de leur valorisation ou de leur gestion a ensuite été consacrée, dans la législation régionale par l’arrêté du Gouvernement wallon du 25 avril 2002.
Depuis lors, les obligations incombant aux producteurs et aux importateurs d’équipements électriques et électroniques en matière de collectes et de traitement des déchets concernés ont été revues par un nouvel arrêté datant de 2010.
Actuellement, les DEEE sont traités de manière spécifique puisqu’il revient aux producteurs et aux distributeurs d’équipements électriques et électroniques d’assurer la collecte et le traitement de ces produits via la cotisation à l’achat.
Le taux de collecte minimum global des DEEE ménagers est fixé à 10 kilos par an et par habitant et à 45 % des équipements ménagers mis sur le marché en Région wallonne, la même année.
Je voulais savoir si cet objectif était respecté ? Atteignait-il les recommandations envisagées par la nouvelle Directive européenne 2012/19 ? Combien de tonnes d’appareils sont actuellement collectées ? Quelle est la proportion d’appareils collectés par rapport aux appareils mis sur le marché wallon ? Quels sont encore les efforts qui doivent être effectués dans ce domaine ?
Alors que la nouvelle directive européenne 2012/19 n’a toujours pas été transposée malgré l’annonce faite dans la DPR, nous attendons avec impatience le nouveau Plan wallon de prévention des déchets. Quels seront les objectifs énoncés ? Peut-on envisager une différenciation des objectifs de réutilisation et de recyclage en fixant, par exemple, des objectifs chiffrés en termes de prévention et de réutilisation ?
En effet, la hiérarchie de mode de gestion des déchets inscrite dans la Directive européenne 2008/96/CE impose de privilégier la prévention et la réutilisation avant même le recyclage. Pourtant, la Région wallonne envisage le mode de la réutilisation et du recyclage sur le même pied dans un même et objectif unique. En effet, notre Région sur plus de 33 000 tonnes de déchets ménagers collectés, seulement 320 000 kilos sont réutilisés comme appareil complet, soit moins de 1 % des déchets collectés.
Quoi qu’il en soit, le total des déchets réutilisés recyclés atteint lui, presque 30 millions de kilos, disons- le comme cela, j’aurais pu le dire en tonne. Au vu de ces chiffres, il apparaît que si les taux annuels de traitement défini par l’arrêté de septembre 2010 sont quasiment systématiquement atteints, c’est parce que les modes de gestion des déchets sont envisagés globalement en tant que mode de recyclage réutilisation et non pas de manière différenciée, ce qui a pour conséquence que pour atteindre les objectifs, une grande majorité des déchets sont traités par le recyclage et moins par la réutilisation. Cette dernière a pourtant montré tout son intérêt si elle est bénéfique pour notre environnement et elle est créatrice et porteuse d’emplois.
Il y a quelques jours, l’Espagne se prononçait en faveur d’une distinction des objectifs. Elle travaille actuellement la différenciation du mode de recyclage et de réutilisation. Si l’option d’un objectif séparé créé l’utilisation n’a pas été retenu par le Conseil européen lors de l’élaboration du texte de la nouvelle directive, j’aurais souhaité connaître votre position sur cette question ? Seriez-vous favorable à cette distinction ?
Depuis plusieurs années, le secteur de l’économie sociale s’est organisé pour privilégier le redéploiement d’unité de réparations de matériel électrique et électronique qui permettent la remise sur le marché de machines d’occasion. Je pense au label Electrorev qui assure la qualité des appareils électroménagers revalorisés par les opérateurs d’économies sociales en Wallonie et à Bruxelles. Il s’agit là, je pense, d’un exemple à suivre et à encourager.
Monsieur le Ministre, et j’en termine, quelles sont les dispositions actuelles qui encouragent la réutilisation des déchets électroniques ? Accepteriez-vous d’introduire des objectifs distincts ?
Réponse du Ministre :
Madame la Députée, je vous rejoins sur l’intérêt de développer des canaux de récolte, de réparation et de réemploi des DEEE – déchets d’équipements électriques et électroniques – et sur le fond, je défends l’idée d’objectifs distincts qui permettent de cibler, matière par matière, aussi type de déchets par type de déchets, des objectifs et donc sans doute d’obtenir globalement de meilleurs résultats.
Pour les DEEE comme pour d’autres produits, je compte bien renforcer la réutilisation et la réparation de ceux-ci comme un des axes phares du futur Plan wallon des Déchets. Les parcs pourraient y jouer un rôle de collecte, au même titre que les ressourceries.
Certaines intercommunales travaillent déjà pour les DEEE avec des entreprises d’économie sociale actives. Onze entreprises ont ainsi accès soit à leurs parcs à conteneurs, soit aux centres de regroupement qu’elles gèrent pour le compte de Recupel.
La collaboration entre les intercommunales et les entreprises d’économie sociale ne se limite pas aux DEEE. De nombreuses ressourceries effectuent aussi la collecte en porte-à-porte des encombrants en Wallonie. La moitié de la population est actuellement couverte par ce service, et seules deux intercommunales ne collaborent pas encore avec une ressourcerie. Des accords sont en cours de négociation, ce qui devrait conduire à une extension de cette collaboration dans le futur.
Je vais également accorder une subvention et cela intéressera M. Maroy, à la mise en place de nouveaux Repair Cafés en Wallonie. Un équipement réparé est un équipement qu’il ne faut pas jeter, même si c’est aux fins de recyclage et donc, on a négocié avec eux une convention qui est par ouverture d’un lieu supplémentaire, une subvention, une aide au départ. On l’a décidé la semaine dernière.
D’autre part, j’ai sollicité le secteur des ressourceries afin qu’il me soumette sa vision de la réutilisation afin d’intégrer au mieux les attentes du terrain dans le futur Plan.
Enfin, concernant une généralisation de l’approche « réutilisation », dans le cadre de la transposition de la Directive relative aux DEEE, la Wallonie avait proposé aux deux autres Régions d’introduire un objectif séparé de réutilisation, c’est l’objectif que j’ai repris en entrée, lors de la concertation interrégionale qui a eu lieu. Cette option n’a cependant pas été soutenue par les deux autres Régions, qui la trouvaient difficilement praticable dans le système mis en place. Il a été, dès lors, convenu d’attendre l’évaluation de la possibilité d’introduire un tel objectif par la Commission européenne. Cette étude est en cours.
Ne nous disputons pas avant de savoir si la possibilité d’introduire un tel objectif est ouverte au niveau européen. Si tel est le cas, il faudrait essayer de convaincre les deux autres régions d’avoir cette position-là, belge, puisqu’aujourd’hui, on traite cela au sein d’une commission interrégionale et donc avec des dispositifs qui, idéalement, doivent être le même sur tout le territoire. Je dis idéalement parce que rien ne nous empêche de traiter au niveau régional ces matières- là. Cela n’a jamais été fait jusqu’ici. Mais ce n’est pas tout à fait exclu à l’avenir.
Christie Morreale :
Si je peux, une petite brève question. Cela veut-il dire que cela pourrait, suite aux discussions européennes, être envisagé dans le prochain Plan wallon ou est-ce que l’on ne sera pas dans le calendrier ? Ce sera difficile.
Réponse du Ministre :
Dans le Plan wallon, je dirais que l’on met ce que l’on veut puisque ce sont nos grandes lignes directrices, nos objectifs ensuite c’est la transposition, en fait la difficulté dans ce secteur-là comme dans d’autres, on a la même chose avec Recupel, avec tous les opérateurs qui agissent sur l’enseigne du territoire. Ils essaient d’avoir des conventions environnementales ou des agréments qui impliquent le même type d’obligations sur tout le territoire belge. Jusque-là, on a toujours eu ce genre d’accord dans les grandes discussions interrégionales.
Mais il y a des problèmes qui se profilent sur lesquels on est très éloigné les uns des autres sur les
objectifs à atteindre. Cela concerne Recupel, mais aussi d’autres obligataires de reprise. Il n’est pas certain du tout que l’on reste dans une configuration telle qu’on la connaît aujourd’hui ou tout se discute entre les trois régions.
Réplique de Christie Morreale :
Je voulais remercier le ministre pour ses réponses. J’aurais souhaité que ce soit plus simple, je vous avoue et sans doute vous aussi, donc on verra comment les discussions pourront aboutir via peut-être d’autres instances. Vous avez donné les chiffres pour les encombrants, en matière de ressources. Vous dites la moitié des communes sont concernées, c’est un chiffre qui m’étonne parce que, par exemple, dans la province de Liège, on a aussi une ressourcerie qui fonctionne et si un certain nombre de communes sont partenaires, il y en a, au fond, très peu qui sont collectées et la difficulté c’est que ce sont les habitants qui paient un coût qui est beaucoup plus élevé alors qu’au final, c’est pour un résultat de tri et de réutilisation qui est beaucoup plus élevé. Il faudra, je pense que l’on puisse améliorer le dispositif et le recouvrir. Je suis aussi persuadée que l’on peut travailler sur le taux de réutilisation, mais aussi sur des fractions qui peuvent être beaucoup mieux recyclées via la ressourcerie. Très récemment, c’est encore aujourd’hui dans la presse ou il y a encore quelques jours, il y a eu un article sur comment bien choisir le label énergétique, en expliquant, qu’au final, il y avait pas mal de gens – puisque l’on parle de réutilisation – qui utilisaient du matériel électrique ou électronique moins cher en imaginant que c’était une économie par rapport à d’autres qui sont très chers. Malheureusement, la qualité n’est pas là et l’obsolescence programmée des produits à un dispositif qui a été introduit dans les années 1930 pour stimuler la consommation a des effets extrêmement pervers parce que l’on sait que les ressources de notre planète sont limitées et il faut que l’on agisse différemment.
Malheureusement pour ce qui concerne les producteurs, on est dans des compétences fédérales. Nous avions pour notre groupe, déposé une proposition de résolution au Sénat en 2011 sur tout ce qui concernait l’étiquetage et sur la durée de vie des projets liés à l’énergie et leur caractère réparable ou bien, comment décourager des produits dont la durée de vie a été volontairement limitée. Je me demande dans quelle mesure on ne pourrait pas essayer d’avoir une prise via la Région pour pouvoir essayer de travailler sur l’obsolescence programmée des produits.