Nécessaire de valoriser encore mieux les producteurs bio wallons
Question orale adressée à René Collin, Ministre wallon de l’Agriculture
Les derniers chiffres relatifs à la croissance de l’agriculture bio en Wallonie démontrent que ce secteur a le vent en poupe. Le soutien de la Wallonie à ce secteur est important, notamment grâce à l’ASBL Biowallonie. Cependant, des inquiétudes de plusieurs natures se font sentir. C’était le cas, par exemple, lors de la réunion organisée par le groupe bio de la FWA, sous la présidence de M. Collienne, et où, je pense, un membre de votre cabinet était présent.
Dans les interrogations que je me permets de relayer, d’après les échos qui reviennent, certains secteurs arriveraient à saturation, l’offre atteignant la demande. Dans le monde économique qui nous entoure, une fois la demande dépassée, les prix peuvent chuter vertigineusement. Or, la production bio permet une valorisation de la production des agriculteurs, qui reçoivent une rémunération juste pour des produits de qualité. Une surproduction pourrait être catastrophique pour eux, qui craindraient de subir quelque part les mêmes difficultés que celles qui sont rencontrées par les agriculteurs conventionnels. Les secteurs concernés seraient ceux de la production des œufs mais aussi du lait, par exemple.
Dès lors, est-il envisageable ou pensez-vous utile, à travers l’ASBL Biowallonie par exemple, qu’elle puisse effectuer un travail de supervision afin d’empêcher que l’on dépasse la demande ? Biowallonie dispose-t-elle des capacités nécessaires pour évaluer les besoins des consommateurs et éventuellement établir un cadastre en la matière ?
Deuxièmement, à cette réunion, certains producteurs, certains agriculteurs bio s’étonnaient qu’effectivement on pratique des prix au rabais avec des hard discounters qui proposent d’acheter des marchandises bio à des prix défiant toute concurrence et qui sont parfois en deçà de ce que cela coûte au producteur. C’est vrai que cela pose des questions parce qu’ils n’ont pas du tout envie de rentrer dans le même mode de processus que ce à quoi certains agriculteurs conventionnels sont contraints aujourd’hui. Ces produits sont proposés effectivement à des prix qui sont réduits. On peut par ailleurs regarder si, sur un même pied d’égalité, les conditions des agriculteurs wallons sont les mêmes dans le bio que celles d’agriculteurs d’autres produits européens.
Si l’on peut imaginer qu’il y a effectivement une forme de concurrence qui est difficile à suivre pour ces producteurs, je souhaitais vous interroger sur la manière dont nous pouvons encore mieux valoriser nos producteurs biologiques wallons. Si l’on peut imaginer que le consommateur choisira peut-être toujours, s’il le peut, des produits locaux, il est important de pouvoir améliorer l’étiquetage qui existe actuellement.
Quelles sont vos réactions sur ces différents éléments ?
Réponse du Ministre
Madame la Députée, les derniers chiffres indiquent en effet qu’au 31 décembre 2015, la Wallonie comptait 1.347 fermes bio, ce qui représente 10,5 % des fermes wallonnes.
Les autres indicateurs du développement de la production biologique, tels que la superficie agricole, le chiffre d’affaires ou les parts de marché sont, eux aussi, au vert.
Cette croissance multidimensionnelle du secteur bio est observée, comme vous le savez, dans le cadre d’un plan stratégique adopté en 2013 par le Gouvernement wallon et qui vise au développement de l’agriculture biologique wallonne à l’horizon 2020.
Biowallonie reçoit, au travers de mes services, des données relatives aux moyens de production mis en œuvre par nos agriculteurs et opérateurs bio ainsi que des chiffres relatifs au marché et à la consommation de produits bio, qui sont enregistrés par GfK Panel Services Benelux.
L’analyse de ces informations montre effectivement que la filière avicole est en pleine expansion. En particulier, la filière poules pondeuses connaît un véritable boum depuis 2010. Biowallonie note cependant que cette forte croissance répond à l’importante demande des filières de commercialisation en Belgique. En 2015, les dépenses pour les produits bio ont augmenté de 18 %.
Actuellement, aucun signal alarmant n’a donc été détecté mais à l’évidence, il convient de rester vigilant. Biowallonie assure à cette fin un suivi attentif des chiffres de production et de consommation des produits biologiques, un véritable monitoring, et s’attache à garantir des débouchés rémunérateurs à nos produits.
Concernant les canaux de distribution des produits alimentaires bio, les supermarchés classiques restent le plus important d’entre eux avec 42 % du marché. Les magasins spécialisés se situent à la seconde place avec 33 % du marché. Quant au hard discount, s’il connaît bel et bien une nette croissance ces dernières années, il ne représente encore et toujours en 2015 que 6 % du marché.
La vente de produits bio par les hard discounters représente effectivement un risque d’écrasement des prix mais, à l’inverse, présente l’avantage aussi de toucher une clientèle qui serait difficilement accessible par d’autres canaux.
Quant au choix des produits locaux, et pas seulement les produits bio, il fait l’objet, vous le savez, d’une attention toute particulière de ma part au travers d’outils tels que le Clic Local, les actions de promotion de l’APAQ-W ou encore le soutien donné par l’encadrement de DiversiFerm pour la transformation et la vente en circuits courts.
Réplique de C. Morreale
Merci, Monsieur le Ministre, pour ces éléments de réponse. Je pense aussi qu’il y a de l’avenir dans des produits bio de base mais aussi des produits transformés et cette conférence qu’organisait la FWA était d’ailleurs très intéressante. Attention, je pense que les agriculteurs nous attendent et espèrent que nous allons anticiper les conséquences du succès et ainsi éviter que l’on tombe dans les mêmes difficultés auxquelles sont confrontés des agriculteurs du conventionnel.
Pour ce qui concerne l’accessibilité, je suis évidemment extrêmement sensible à la question. Aujourd’hui, malheureusement, et on peut le regretter, le bio est encore trop peu utilisé par des personnes qui n’ont pas ou peu de moyens et pourtant, parfois, c’est sans doute possible, notamment via les repas scolaires.