Christie à la ferme
Ce 1er avril représente, pour le secteur de la production laitière, le premier jour sans quotas au sein de l’Union européenne. Ce système, qui permettait de réguler les volumes et les prix et qui avait fait l’objet d’ajustements au cours des dernières années, était en vigueur depuis plus de 30 ans.
La semaine dernière, une délégation de producteurs laitiers de la FWA (Fédération Wallonne de l’Agriculture) s’était postée devant le Parlement wallon afin de remettre aux élus un échantillon des richesses produites en Wallonie et les sensibiliser aux difficultés auxquelles les exploitations risquent d’être confrontées dans un contexte sans quotas…
Ce jour-là, je suis allée à leur rencontre. J’y ai notamment appris que l’on dénombre aujourd’hui moins de 10.000 producteurs de lait en Belgique. En Wallonie, ils sont moins de 3.500. Un chiffre qui pourrait encore diminuer à la suite de la suppression des quotas laitiers… En effet, les agriculteurs peuvent désormais produire la quantité de lait qu’ils souhaitent. Le risque de volatilité des prix du litre de lait est donc accru et cela pourrait mettre en péril certaines exploitations.
Ce mercredi matin, j’ai enfilé de grosses chaussures pour me rendre à la ferme Brouir à Ham (Esneux). J’y ai été agréablement reçue par Mr et Mme Brouir qui gèrent, à deux, une exploitation de 180 bêtes, dont 54 vaches laitières. Les autres bêtes sont des vaches viandeuses et des jeunes. Le fait d’aller à leur rencontre et de visiter leurs installations m’a permis de me rendre compte des contraintes qu’ils subissent au quotidien, de la difficulté de leur métier… Toujours plus de contraintes, de démarches administratives et de coûts! Et pourtant, ils continuent d’exercer leur métier avec passion!
De l’extérieur, on ne se rend pas compte du travail et des sacrifices que cela demande… De longues journées qui commencent dès 5 h du matin, des bêtes à traire et nourrir plusieurs fois par jour, des étables et enclos à nettoyer très régulièrement, des installations à entretenir afin de satisfaire aux normes et contrôles, des charges importantes (à titre d’exemple, une vache boit 80 l d’eau par jour, plus encore en été)…
« L’hiver, toutes les bêtes sont à l’intérieur. Ce qui coûte plus cher puisqu’on leur donne des farines, du foin à manger. Et il faut savoir que ce que l’on reçoit quand on vend notre lait n’est pas suffisant pour payer les farines…« , souligne Mr Brouir. « Nous recevons des primes selon le nombre de bêtes mais, en général, elles servent à payer la nourriture« .
Bref, c’est un véritable cercle vicieux… « C’est très bien qu’il y ait des contrôles mais ils sont payants. Les terrains se font rares et quand il y en a à vendre, ils sont impayables et ce sont finalement de grosses firmes qui les achètent pour y faire, à terme, des logements« , constate Mme Brouir. « On dit aux agriculteurs d’investir mais c’est s’enfoncer encore plus« !
En tenant compte de tous ces paramètres et dans ce contexte sans quotas, il est difficile pour Mr et Mme Brouir d’envisager l’avenir sereinement… Ils ont un jeune fils qui ne demanderait sans doute pas mieux que de pouvoir, plus tard, reprendre la ferme mais dans quelles conditions ? La situation est telle, au vu des tarifs pratiqués, que Mr Brouir finit même par se demander si les exploitations agricoles parviendront à subsister…
A l’issue de cette rencontre, en tant que parlementaire, mon rôle sera de relayer auprès de nos instances les difficultés que rencontrent nos agriculteurs.