Les récents débats suscités en Europe par la signature du CETA ont révélé que la manière dont l’Union européenne négocie les traités commerciaux internationaux, et le contenu de ceux-ci, ne sont pas partagés par une grande majorité de citoyens.
Inspirées par des valeurs de solidarité, de démocratie et de progrès, valeurs qui fondent l’Union européenne, cette proposition de résolution, que je co-signe, a pour objectif de fixer des balises claires et précises afin d’encadrer les accords commerciaux futurs ou en cours de négociation de l’Union européenne.
Développements
Les récents débats suscités en Europe par la signature du CETA ont révélé que la manière dont l’Union européenne négocie les traités commerciaux internationaux, et le contenu de ceux-ci, ne sont pas partagés par une grande majorité de citoyens. Inspirées par des valeurs de solidarité, de démocratie et de progrès, valeurs qui fondent l’Union européenne, cette proposition de résolution a pour objectif de fixer des balises claires et précises afin d’encadrer les accords futurs ou en cours de négociation de l’Union européenne.
Dans la continuité du travail entamé par le Parlement wallon dans le dossier CETA, les auteurs de la présente résolution souhaitent poursuivre leur réflexion sur la manière dont les négociations sont menées et sur les objectifs et les impacts de ces accords de libre-échange sur nos populations et nos modes de vie.
Etant donné l’impact global de ces accords, il est clair que ceux-ci dépassent le cadre purement commercial et touchent à toute une série de valeurs fondamentales, telles que le droit des états à réguler, la préservation des services publics et de notre modèle agricole, les normes sociales, sanitaires ou environnementales, les droits de l’homme ou encore la transparence des négociations et la recherche de l’intérêt général au détriment des intérêts privés d’un petit nombre.
L’Union européenne négocie actuellement de nombreux accords de libre-échange, de manière multilatérale, comme l’ACS (Accord sur le commerce des services) ou dans une approche bilatérale, avec le Vietnam, le Japon, le Mexique, etc. Dans ce cadre, et afin de déterminer les priorités du Parlement de Wallonie, il est indispensable de préciser les contours qui fixent les lignes rouges à ne pas franchir quant au contenu de ces accords.
Les principes mis en avant doivent permettre à l’Union européenne de démontrer que les échanges commerciaux ne servent pas les intérêts privés au détriment de l’intérêt public, mais contribuent à la lutte contre le réchauffement climatique et au développement durable, en particulier des régions les plus défavorisées, et au rapprochement entre les peuples.
Le Parlement de Wallonie est, comme l’a démontré le dossier CETA, pleinement compétent en ce qui concerne les traités mixtes et, dès lors, notre responsabilité est engagée lors de l’assentiment de ceux-ci. L’objectif des auteurs de cette résolution est donc de fixer leurs priorités en la matière, et ce afin de garantir le bon fonctionnement des institutions européennes. L’objectif n’est certainement pas de bloquer un processus mais d’agir préventivement afin que les décideurs européens puissent être informés des priorités qui sont les nôtres et qui répondent à notre souhait d’une Europe sociale, juste et humaine, portée par des valeurs de solidarité, de démocratie et de progrès.
Proposition de résolution concernant les accords de libre-échange négociés par l’Union européenne
Le Parlement wallon,
A. Considérant que, suite aux débats relatifs au CETA, il est apparu que des améliorations étaient nécessaires afin de modifier la façon dont sont négociés les accords commerciaux de l’Union européenne et le contenu de ceux-ci;
B. Considérant qu’il est essentiel de permettre, tout au long du processus, le respect des procédures démocratiques de contrôle parlementaire et la transparence des négociations;
C. Considérant que les traités commerciaux dits « de nouvelle génération » ne peuvent en aucune manière affaiblir les législations qui protègent le modèle socioéconomique, sanitaire et environnemental de l’Union européenne et de ses États membres, et qu’ils contribuent au développement soutenable, à la réduction de la pauvreté et des inégalités, et à la lutte contre le réchauffement climatique;
D. Considérant qu’il convient de garantir l’intérêt public dans le cadre de la résolution des différends et d’assurer que la résolution des différends entre les entreprises et les Etats ou autres Parties aux traités offre les plus hautes garanties juridictionnelles de protection de l’intérêt public;
F. Considérant la « Déclaration de Namur » du 5 décembre 2016;
G. Considérant la Proposition de Résolution « sur l’Accord économique et commercial global (AECG/CETA) » adoptée par le Parlement de Wallonie le 27 avril 2016;
H. Considérant l’ensemble des Déclarations jointes à l’Accord économique et commercial global (AECG/CETA) entre le Canada et l’Union européenne et en particulier la Déclaration du Conseil publié le 27 octobre 2016 sur la protection des investissements et la Cour d’investissement (ICS) qui souligne que : « La Commission européenne et le Conseil considèrent que ce mécanisme révisé sur base des termes de la présente déclaration constitue une étape vers la mise en place d’une Cour multilatérale de l’investissement qui constituera, à terme, la juridiction en charge du règlement des litiges entre investisseurs et État »;
I. Considérant l’ensemble des débats et auditions sur le CETA qui ont eu lieu au Parlement de Wallonie;
J. Considérant la proposition de Résolution « relative aux accords de libre-échange négociés par l’Union européenne et plus spécifiquement au Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement » déposée en date du 12 mai 2015 au Parlement de Wallonie;
K. Considérant les traités commerciaux actuellement négociés par la Commission européenne ;
Demande au Gouvernement wallon
1. d’agir auprès du Gouvernement fédéral afin de plaider, au niveau européen :
– pour la mise en place d’analyses contradictoires et publiques des effets potentiels d’un nouveau traité avant d’établir un mandat de négociation, afin d’assurer qu’il contribuera au développement soutenable, à la lutte contre le réchauffement climatique et à la réduction de la pauvreté et des inégalités;
– pour la soumission des mandats de négociation à un débat parlementaire préalable, dans les assemblées nationales et européenne ainsi que dans les assemblées régionales dotées de pouvoirs équivalents pour ce qui concerne les traités mixtes, en y associant le plus largement possible les représentants de la société civile;
– pour la publicité des résultats intermédiaires des négociations en temps utile et de manière accessible, afin que la société civile puisse en prendre pleinement connaissance et qu’un débat parlementaire puisse être mené avant la clôture des négociations;
– pour ne pas privilégier la méthode de « l’application provisoire », afin de permettre aux Parlements de conserver leur plein et entier pouvoir de contrôle dans le cadre de la procédure d’assentiment des traités mixtes;
– pour la ratification, avec nos partenaires commerciaux, des principaux instruments de défense des droits de l’homme, des conventions essentielles de l’OIT, des recommandations issues du projet BEPS (érosion de la base d’imposition et transfert de bénéfices) et des Accords de Paris sur le climat;
– pour l’inclusion dans de tels traités d’exigences chiffrées en matière fiscale et climatique, comme par exemple des taux minimaux d’imposition des profits des sociétés et des cibles vérifiables de réduction des gaz à effets de serre;
– pour la généralisation de l’inclusion et de la mise en oeuvre effective de normes sociales et environnementales élevées et contraignantes de manière à assurer la protection des droits humains et de l’environnement afin notamment de prévenir tout risque de dumping social et environnemental;
– pour que le mandat de la Commission européenne pour négocier tout accord de libre-échange soit attentif aux intérêts des acteurs agro-alimentaires européens, ainsi qu’aux intérêts des consommateurs, en refusant toute réduction des normes sanitaires et agro-alimentaires et en renforçant les informations aux consommateurs afin que ceux-ci puissent exactement connaître la composition et l’origine des produits qu’ils consomment;
– pour la protection et la promotion de la diversité culturelle en faisant inscrire dans les accords de libre-échange la référence à la Convention de l’UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles;
– pour l’exclusion intégrale des services publics et les services d’intérêt général, tels que définis dans les législations respectives des Parties, du champ d’application de tels traités;
– pour l’exclusion de la méthode des « listes négatives » dans l’établissement du champ des activités ouvert à la concurrence, en prévoyant systématiquement des clauses permettant aux Parties de reprendre la propriété publique d’un secteur sans autre condition que celles imposées par la législation nationale;
– pour prévoir des clauses de standstill qui empêchent les Parties de réduire leurs normes sociales, sanitaires et environnementales pour favoriser les exportations ou attirer les investissements, en assortissant ces clauses de mécanismes de sanction, et en assurant que la mise en conformité des Parties avec leurs obligations en vertu de ces clauses ne pourra en aucun cas fonder une demande d’indemnisation dans le chef des investisseurs ou autres opérateurs économiques privés;
– pour l’inclusion des mécanismes de coopération loyale et effective, notamment pour ce qui est des échanges d’informations, en ce qui concerne la fiscalité des multinationales et des sociétés offshore;
– pour la mise en place de mécanismes d’évaluation indépendante et régulière des effets socio-économiques et environnementaux de tels traités, en permettant leur suspension par les Parties, y compris dans l’éventuelle phase d’application provisoire, et leur révision périodique afin d’assurer qu’ils contribuent au développement soutenable, à la réduction de la pauvreté et des inégalités, et à la lutte contre le réchauffement climatique;
– pour privilégier le recours aux juridictions nationales et européennes compétentes, et n’instaurer un mécanisme international de règlement des différends que dans la mesure où celui-ci présente des avantages certains sur le plan de l’application uniforme des traités, de la célérité et de la compétence des juges et comporte un mécanisme d’appel garantissant la cohérence des décisions rendues au premier degré;
– pour l’application des plus hauts standards aux mécanismes internationaux de règlement des différends, en ce qui concerne notamment les conditions de nomination et de rémunération des juges, ainsi que leurs garanties d’indépendance et d’impartialité, pendant et après l’exercice de leur mandat;
– pour garantir que les juges soient pleinement qualifiés pour interpréter et appliquer les accords commerciaux en conformité avec les autres règles du droit international, notamment en matière de droits de l’homme, du travail et de l’environnement;
– pour assurer l’égalité d’accès aux mécanismes internationaux de règlement des différends, notamment par l’adoption de mesures en faveur des PME et des particuliers visant à alléger les implications financières du recours à ces mécanismes.
2. de veiller au suivi des ces demandes en informant le Parlement wallon des réponses obtenues au niveau européen à propos des différentes balises énoncées ci-dessus.