Question écrite à Maxime Prévot, Ministre des Travaux publics; de la Santé; de l’Action sociale et du Patrimoine
Tout comme moi, Monsieur le Ministre a certainement dû lire le constat dressé dans la presse, le 22 octobre dernier, par la Commission d’accompagnement pour le recrutement des personnes avec un handicap dans la fonction publique fédérale. Selon cette commission, la fonction publique fédérale est loin de l’objectif fixé par arrêté royal en 2007 des 3 % d’employés porteurs d’un handicap puisque ce taux atteignait, fin de l’année 2014, 1,45 %. Pour la première fois depuis 2009, ce taux est donc en diminution.
En analysant plus finement ces chiffres, on constate que certains services font figure de bons élèves alors que d’autres n’engagent simplement aucun travailleur handicapé. Pire encore puisqu’on constate également que 40 % de ces travailleurs sont âgés de 55 ans et plus. Ceci signifie donc que l’objectif des 3 % d’embauche s’éloigne, compte tenu des nombreux départs à la retraite. Je tiens également à noter l’écart qui existe entre l’engagement des hommes (54,37 %) et celui des femmes (45,63 %). Ajoutons, pour terminer ce triste constat, que très peu d’entre eux sont présents dans les fonctions supérieures.
À notre niveau, Monsieur le Ministre m’assurait, il y a plusieurs semaines, que dans les Provinces, les Communes, les Centres publics d’action sociale et les Associations de services publics wallons, les recommandations formulées par la Commission wallonne des personnes handicapées au sujet de l’intégration professionnelle des travailleurs handicapés étaient relativement positives malgré le manque d’information dont ils disposaient. Je regrette moi-même de ne pas disposer de ces recommandations…
Quoi qu’il en soit, il ressortait de cela que si certains services atteignaient et même dépassaient l’objectif wallon de 2,5 %, d’autres ne le respectaient pas. Comment ces services vont-ils dès lors procéder pour rattraper ce retard ? Une liste des demandeurs d’emploi porteurs d’un handicap ne devrait-elle pas être fournie à ces services afin qu’ils puissent procéder à des recrutements à partir de cette liste ? Les recommandations émises semblent également insister sur la nécessité de mettre en avant et de valoriser les bonnes pratiques et les services particulièrement actifs dans ce domaine. Dès lors, qu’entend faire Monsieur le Ministre ?
Réponse du Ministre
Les chiffres qu’évoque l’honorable membre sont, comme elle l’indique, relatifs à la situation de l’emploi de travailleurs handicapés au sein de la fonction publique fédérale. Il ne s’agit bien sûr pas de ma sphère de responsabilité. J’insiste néanmoins sur ce point dans la mesure où la réglementation fédérale est assez différente de la réglementation wallonne, tant en ce qui concerne les services du Gouvernement wallon (SPW et OIP dont le personnel est soumis au Code wallon de la fonction publique) qu’en ce qui concerne les pouvoirs locaux (provinces, communes, CPAS, associations de services publics).
La législation fédérale est centrée sur les travailleurs recrutés ou à recruter en tant que personnes handicapées. La législation wallonne, quant à elle, ambitionne de couvrir non seulement cet aspect mais aussi de responsabiliser les employeurs publics aux deux autres étapes que sont l’intégration et le maintien à l’emploi, en ce compris des travailleurs qui deviennent handicapés en cours de carrière. Concernant ces services wallons, les données disponibles commencent à dater. Mais dans les prochains jours, ils seront invités, comme le prévoit la règlementation, à communiquer à l’AWIPH la situation de l’emploi de travailleurs handicapés en leur sein au 31 décembre 2015. Une synthèse sera ensuite établie pour informer le Gouvernement wallon. La commission d’accompagnement se réunira par la suite pour formuler toutes recommandations utiles ou pistes pour favoriser la politique de recrutement et d’emploi des personnes handicapées.
Afin de « rattraper le retard » qu’évoque l’honorable membre au sujet des pouvoirs locaux qui ne rencontraient pas l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés lors de l’état des lieux au 31 décembre 2013, la commission d’accompagnement pour la mise en œuvre de cette règlementation (rejointe par la Commission wallonne des personnes handicapées) a récemment formulé les recommandations suivantes :
* Organiser des actions de sensibilisation et d’information sur le handicap via l’Union des Villes et Communes et la Fédération des CPAS et inviter les services qui ne rencontrent pas (ou insuffisamment) l’obligation à justifier leur situation.
* Récolter et diffuser des actions mises en œuvre par l’ensemble des services en vue d’une réelle prise en compte des besoins des travailleurs handicapés lors du recrutement, de l’entrée en fonction et en cas de difficultés à conserver leur emploi.
* Moduler la (seule) sanction (indirecte) visant actuellement le refus de certaines interventions financières de l’AWIPH aux services qui ne respectent pas l’obligation, en fonction du résultat des services afin de soutenir les efforts déployés.
* Lier le taux d’emploi de travailleurs handicapés et la dotation en provenance du fonds des communes ou encore l’attribution de points en vue d’aides à la promotion de l’emploi (APE).
J’attire, également, l’attention sur la collaboration fructueuse que j’observe entre le CRF (Conseil régional pour la formation des pouvoirs locaux) et l’AWIPH qui a permis la création de supports (fiches, vidéos, site internet) visant la sensibilisation et l’information, notamment des Directeurs généraux et responsables en ressources humaines, au handicap et à sa gestion dans le contexte de l’emploi. Ce canal pourrait être à nouveau utilisé pour la diffusion de bonnes pratiques, une fois récoltées.
À propos de la proposition d’établissement d’une liste des demandeurs d’emploi en situation de handicap à fournir aux employeurs en vue de recrutements ciblés, je resterai prudent. D’une part, pareille liste ne peut nullement être établie sans le consentement exprès de chaque personne qui y figurerait. Elle devrait aussi l’être sur base des compétences, vérifiées, des candidats. En quelque sorte, ce que SELOR est chargé de pratiquer depuis quelques années. On constate cependant que la liste des lauréats en situation de handicap établie par le SELOR comporte un nombre (trop) limité de candidats potentiels aux yeux des employeurs publics ; la formule ne séduisant pas particulièrement les lauréats aux examens.
Par ailleurs, je ne suis pas particulièrement partisan d’une politique de « réservation » de postes. Il me paraît, en effet, davantage opportun de travailler à la sensibilisation des acteurs compétents en matière de politique d’emploi afin d’ouvrir potentiellement tout emploi à tout candidat, en ce compris les personnes handicapées. Celles-ci doivent être soumises aux mêmes épreuves de vérification de leurs compétences, moyennant les aménagements raisonnables éventuellement à y apporter.
En Région wallonne, il revient au FOREm de veiller à la rédaction d’offres d’emploi qui devraient spécifier les aptitudes (physiques, sensorielles, mentales, …) requises pour les tâches essentielles des fonctions soumises au recrutement. Elles devraient également renseigner sur les modalités de sélection (à adapter aux besoins individuels). Un message, en ce sens, a, par ailleurs, été livré à l’Union des Villes et communes afin de veiller à l’adaptation des offres publiées sur son site internet « Jobcom ». Le suivi de ces différentes pistes sera bien entendu réalisé en tenant compte des travaux des commissions d’accompagnement mises en place.