Clarifier la gestion de notre patrimoine : Un choix politique
Région wallonne
QUESTION ORALE DE MME MORREALE À M. PRÉVOT, MINISTRE DES TRAVAUX PUBLICS, DE LA SANTÉ, DE L’ACTION SOCIALE ET DU PATRIMOINE, SUR « LA RÉGIONALISATION DE LA GESTION DU PATRIMOINE MOBILIER »
Monsieur le Ministre, le 23 et 24 avril dernier la sixième Conférence du Conseil de l’Europe des ministres en charge du Patrimoine s’est tenue dans la capitale de la Wallonie.
Nous nous réjouissons de l’appel qui a été formulé à l’issue des travaux en ce qui concerne la condamnation des actes qui détruisent ou dégradent notre patrimoine européen.
Actualité oblige, face aux atrocités notamment commises à l’encontre des sites et de musées archéologiques au Proche-Orient, il a notamment été souligné l’importance pour les pays européens d’agir à l’internationale pour protéger le patrimoine.
S’il convient de s’intéresser aux dégradations subies par le patrimoine à l’étranger, il faut également bien s’interroger sur la gestion de notre patrimoine et, singulièrement, de notre patrimoine wallon.
Suite à la fédéralisation de la Belgique, le patrimoine immobilier est devenu une compétence régionale, tandis que le patrimoine mobilier est une compétence de la Fédération Wallonie Bruxelles.
Cette distribution de compétences constitue sans doute un frein à la bonne gestion de notre patrimoine. Il ne saurait y avoir une politique efficace de protection et de valorisation du patrimoine sans une approche globale qui épouse les différentes formes patrimoniales. Nous connaissons aussi les difficultés rencontrées par de nombreux acteurs patrimoniaux face à cette distinction, notamment en termes de charges administratives.
Vous évoquiez, dans Le Soir du 22 avril dernier que votre souhaitiez régler ce problème. Je pense que c’est une bonne idée. Néanmoins, nous souhaiterions savoir de quelle manière vous voudriez régler cette question. Déjà en 1999, la Commission du budget, des affaires générales et des relations extérieures avait adopté une résolution appelant à une plus grande coopération entre la Communauté française et la Région wallonne et, le cas échéant, le transfert de l’exercice de la compétence en matière de patrimoine mobilier culturel vers la Région wallonne.
Aujourd’hui, qu’en est-il de la coopération entre les deux entités concernant le patrimoine ? La situation actuelle nécessite-t-elle un transfert de compétence vers la Wallonie ? Quels sont vos projets en la matière ?
Réponse du Ministre :
Madame la Députée, je ne peux qu’évidemment me rallier à votre analyse. Singulièrement lorsque vous évoquez, dans des termes choisis ,le côté un petit peu particulier pour ne pas dire abscons, d’avoir, d’un côté, le patrimoine mobilier et, de l’autre, le patrimoine immobilier. Je partage cette analyse.
Le hiatus entre patrimoine mobilier et patrimoine immobilier issu des réformes institutionnelles successives ne contribue effectivement pas à une politique de promotion conjointe de toutes les composantes de notre héritage collectif.
L’accord de coopération du 18 avril 2008 lie déjà la Fédération et la Wallonie à cet égard, mais ne porte que sur la restauration et la réaffectation des infrastructures culturelles. Il fait l’objet d’un accompagnement au niveau de la plateforme patrimoine-culture-tourisme, et c’est notamment dans ce cadre que la Wallonie, via le travail conséquent mené par l’IPW, a intégralement assumé son rôle dans la réaffectation de Boch Keramis et vient, comme vous le savez, probablement de passer le flambeau à la Fédération.
Au-delà de cette collaboration, la Déclaration de politique régionale exprime clairement la détermination du Gouvernement wallon à réconcilier pleinement le patrimoine immobilier et le patrimoine mobilier.
Je suis effectivement déterminé à œuvrer concrètement à cette réconciliation et, en tant que Ministre du Patrimoine, j’ai d’ailleurs chargé mon cabinet de prendre l’initiative d’un groupe de travail avec les cabinets de mes collègues, les ministres du Tourisme en Wallonie et de la Culture en Fédération Wallonie-Bruxelles afin de concrétiser la jonction tant attendue et de la sortir des leviers de la politique du tourisme.
Les premiers contacts ont été pris et si l’agenda entre les trois cabinets et bien confirmé, le groupe de travail se réunira dans les prochaines semaines.
Il travaillera en bonne entente avec la plateforme administrative que je viens d’évoquer et à qui il appartient aussi d’avancer sur cette problématique.
Vous reconnaîtrez toutefois avec moi qu’il ne s’agit pas d’un dossier simple. Il implique un accord entre les différents niveaux de pouvoir, une clarification des moyens budgétaires disponibles de part et d’autre et ensuite des actes juridiques concrets.
Il est en ce sens indispensable de déterminer l’option la plus judicieuse. Un transfert de l’exercice de la compétence, au sens le plus strict – ce qui à mon sens serait le plus facile, en tout cas dans la gestion a posteriori peut-être pas dans la réalisation du montage juridique a priori – ou bien un accord de coopération, c’est-à-dire une coopération plus large spectre que ne permet l’accord actuel.
On pourrait se dire, en l’occurrence, que la bonne fin est plus importante que les moyens, même si on ne peut pas négliger non plus la question des moyens.
Je souhaiterais pouvoir procéder à un premier d’état des lieux sur la réflexion en cours dans le courant été. Sur cette base, mes collègues et moi-même identifierions le véhicule juridique le plus approprié et établirions un calendrier travail pour le mettre en œuvre.
C’est avec plaisir que je ne manquerai pas de revenir vers vous en temps opportun.
Réplique de Christie Morreale :
Je remercie M. le Ministre pour ses éléments de réponse.
Je trouve que la formule dans la Déclaration de politique régionale « réconcilier pleinement » est presque poétique. Elle est dite de manière positive. C’est une bonne formule pour faciliter les liens et surtout viser ce que je pense être le principal objectif ; c’est une meilleure efficacité dans l’intérêt de notre patrimoine wallon qu’il soit mobilier ou immobilier.
Il est vrai que, si la Belgique est une terre de compromis, il nous appartient d’essayer de mettre de l’huile dans les rouages pour faire en sorte que l’on puisse atteindre un objectif de meilleure efficacité.
Je reviendrai vers vous à la rentrée parlementaire, comme vous me le suggérez.
Je vous remercie pour vos réponses.